communiqué
Focus sur les données du secteur
Un secteur qui fait globalement face mais dont le réseau de commerces est extrêmement fragile Depuis 2020, la CSFI fait paraitre chaque année en fin d’été un point de conjoncture réalisé à partir d’une enquête adressée aux professionnels de la facture instrumentale en fin de premier semestre. Si cette année le taux de réponse a été moins important que pour les enquêtes précédentes, les résultats n’en donnent pas moins de précieux indicateurs sur l’état du secteur. Cette année, en plus de l’analyse globale, une analyse détaillée a été réalisée à partir des réponses des trois catégories de professionnels les plus représentées au sein des répondants : les artisans (luthiers, facteurs d’instruments etc.), les commerces en instruments de musique et les fabricants (hors artisans).
Concernant le premier semestre 2024, la tendance globale au niveau de l’activité économique est à la stabilité, une situation plus favorable qu’en 2023 avec une baisse de 6 points de ceux qui constatent une diminution de leur CA. En revanche, sur le nombre de clients, si un tiers des professionnels constate une baisse (+3 %), ils sont désormais 18,4% – en hausse de 4 points – à constater une augmentation de leur clientèle.
C’est sur le champ de la trésorerie qu’on mesure la fragilité grandissante du secteur avec une chute de 8 points de ceux qui considèrent avoir un bon niveau de trésorerie (à 40,28%). Cependant, l’étiage de ceux qui considèrent que leur trésorerie est insuffisante baisse également fortement. Côté moral, comme l’année dernière, les retours sont partagés avec une moitié qui se sent bien et une autre moitié qui se sent assez ou très inquiet, fatigué, stressé.
Concernant l’activité 2023 – en comparaison avec celle de 2022 – on constate une stabilité dans l’évolution des chiffres d’affaires avec 37,5 % des répondants annonçant une augmentation de celui-ci (en hausse de 0,55%) et une légère érosion de ceux dont le CA est en baisse à 31,25 % (moins 1,75%). La vente est l’activité la plus impactée : les répondants sont désormais 34 % (+7%) à constater une baisse des ventes. En parallèle, ce sont un peu moins de 30% ( -2%) qui constatent une hausse des ventes. Les autres activités semblent assez stables : nous avons introduit la vente d’instruments d’occasion pour la première fois. Si les répondants ont été moins nombreux cette année, ils sont en revanche deux fois plus nombreux à avoir une activité de réparation. Cette variabilité n’indique donc pas nécessairement une évolution de l’activité des professionnels.
Concernant le panier moyen 2023 de dépense des clients, 40 % l’estiment stable par rapport à celui de 2022. Près de 37% indiquent qu’il semble avoir un peu ou fortement baissé entre les deux années. Pour les ¾ des répondants, les effets de l’inflation se font sentir sur l’activité ; ces effets sont fortement ressentis pour 46 % des professionnels.
Enfin, pour ce qui est des approvisionnements, près de 44% indiquent rencontrer des difficultés. Pour 58% d’entre eux ? l’impact de ces difficultés est sensible mais gérable. Mais plus préoccupant : un quart des répondants en ressentent les effets sur leur rentabilité. Les difficultés d’approvisionnement – en matières premières, comme en matériel – sont donc un enjeu important qui semble s’installer de manière récurrente pour les entreprises du secteur, tout comme le coût du transport. Une note positive : les fabricants (hors artisans) affichent les meilleurs résultats et les meilleures perspectives. C’est une nette amélioration depuis la crise Covid.
En résumé, nous avons une activité qui se consolide, des trésoreries juste suffisantes, des ventes et des paniers moyens en baisse. Le secteur fait globalement face à la conjoncture, mais est relativement fragile.
Le moral est là pour la moitié des répondants seulement. Les perspectives pour la rentrée à venir sont également partagées, puisqu’à part égale les uns estiment qu’elle sera normale ou bonne, et les autres qu’elle sera partiellement ou sérieusement impactée par le contexte économique. Les fabricants (hors artisans) sont ceux qui affichent les meilleurs résultats et les meilleures perspectives.
FOCUS SUR LES MAGASINS DE MUSIQUE : une situation particulièrement préoccupante
Cette année, l’analyse des réponses permet de réaliser un focus plus spécifique sur les magasins de musique dont la situation globale semble particulièrement préoccupante. Les retours de cette enquête étayent les remontées de terrain qui nous sont parvenues depuis quelques mois. On le voit : sur la quasitotalité des questions, les réponses des commerces d’instrument indiquent une situation bien plus mauvaise que pour l’ensemble du secteur.
- Près de la moitié des magasins répondants indiquent une baisse de leur CA au premier semestre 2023 ainsi qu’une baisse du nombre de leurs clients. Ces difficultés ont des incidences sur l’état moral des répondants : 67 % disent être assez ou très stressés, fatigués, inquiets. C’est 24% en plus de la moyenne des répondants.
- Le pass Culture est un outil repéré et utilisé par 45% d’entre eux, mais l’évolution du dispositif – et notamment la suppression des bons d’achat – a eu un impact fort pour 32 % des répondants.
- Concernant l’année 2023 – en comparaison avec 2022 -, 43% annoncent une baisse de leur CA (contre 31% pour la totalité des répondants). L’activité de vente est en baisse pour 51 % d’entre eux (34 % pour la totalité des répondants), avec une augmentation de l’activité de vente de seconde main. L’activité de réparation se maintient ou est en légère augmentation. 43% des magasins répondants ont une activité de vente en ligne (contre 5% pour les artisans), mais pour 43 % d’entre eux celle-ci n’a pas d’impact particulier sur le chiffre d’affaires. La même proportion a vu son activité en ligne baisser.
- Concernant le panier moyen du client : si un peu plus d’un quart le considère stable, c’est beaucoup moins que chez les artisans (42%). Mais pour plus de 43% des commerces répondants, il est en baisse (contre 36 % chez les artisans).
- Pour 84 %, les effets de l’inflation se font encore sensiblement sentir c’est 10 points de plus que pour les artisans
- Parmi les rares points positifs : les problèmes d’approvisionnement touchent un peu moins les commerçants que les autres professionnels. En revanche, quand ils sont là ils affectent de façon sensible la rentabilité de la structure (46% vs 18% pour les artisans)
L’ensemble de ces éléments a des conséquences notables sur les perspectives pour la rentrée, moment crucial de l’activité : un tiers d’entre eux sont relativement optimistes (16 % d’entre eux s’attendent à faire une bonne rentrée et 16% à avoir une rentrée normale), les deux autres tiers prévoient une mauvaise rentrée. Là encore, les réponses sont beaucoup plus négatives que pour l’ensemble des répondants qui sont à 50-50.
Le premier semestre 2024, comme l’année 2023, sont de mauvais millésimes pour les magasins de musique. Fortement concurrencés par la vente en ligne – et dans une moindre mesure par les grandes surfaces culturelles -, mais plus globalement par l’évolution des systèmes de distribution et par les changements d’usages de consommation, d’accessibilité et de mobilité, les magasins de musique sont entrés dans une zone de forte turbulence dont on peut craindre qu’elle puisse, à terme, faire disparaitre un grand nombre d’entre eux. Or, ces magasins de proximité jouent un rôle essentiel pour la vie musicale locale, rôle que ne pourra jamais jouer un site de vente en ligne. Il convient d’être particulièrement vigilants sur le devenir de ces magasins et sur le nombre de fermetures en cours et à venir. Une situation qui demande une réflexion urgente avec l’ensemble des parties prenantes sur ce qu’il faut mettre en place pour prévenir la disparition de ces activités partout où cela est possible. Pour consulter les résultats de l’enquête, suivez ce lien